Opinion – Journée mondiale des abeilles : décoloniser notre écologie pour sauver les butineuses

Opinion – Journée mondiale des abeilles : décoloniser notre écologie pour sauver les butineuses

Ce 20 mai, le monde célèbre la Journée mondiale des abeilles. L’occasion, dit-on, de rendre hommage à ces ouvrières du vivant, essentielles à notre alimentation et à nos écosystèmes. Mais au-delà des discours techniques et des appels convenus à la préservation, il faut oser dire ce qui dérange : la destruction des abeilles est aussi l’héritage d’un système colonial qui continue de dévorer nos terres et notre avenir.

Les abeilles, premières victimes d’un modèle imposé

Comment expliquer que dans tant de régions d’Afrique, les abeilles disparaissent alors qu’elles faisaient partie intégrante de l’environnement local depuis des siècles ? La réponse n’est pas seulement dans les pesticides ou la déforestation actuelle. Elle est dans l’histoire coloniale, dans cette logique d’exploitation brutale qui a transformé nos forêts en plantations, nos savoirs en silence, notre biodiversité en marchandise.

Au Congo, les colons belges ont abattu des hectares de forêts pour planter du café, du coton ou du caoutchouc – des cultures pensées pour l’export, pas pour nourrir les populations ni respecter la terre. Dans ce sillage destructeur, les abeilles ont perdu leur habitat, comme tant d’autres espèces essentielles.

Une écologie à repenser, au-delà du vernis occidental

Aujourd’hui encore, ce modèle perdure sous de nouveaux habits : agriculture industrielle, semences importées, engrais chimiques imposés. Ce n’est pas une modernisation, c’est une continuité coloniale. Et tant que nous n’oserons pas la nommer, nous continuerons de perdre les abeilles, et bien plus encore.

Revaloriser nos savoirs, protéger nos pollinisateurs

Il est temps de décoloniser notre écologie. De sortir d’une vision technocratique et occidentalisée de la nature pour revenir à des pratiques enracinées, respectueuses, locales. Des apiculteurs congolais le prouvent chaque jour : il est possible de produire du miel, de préserver les abeilles et de vivre dignement, sans sacrifier l’équilibre naturel.

Alors en cette Journée mondiale des abeilles, ne nous contentons pas de slogans. Faisons le lien entre écocide et colonisation, entre agriculture et souveraineté, entre pollinisation et autodétermination.

Sauver les abeilles, c’est aussi se réapproprier nos terres, nos savoirs, notre avenir.

Diddy MASTAKI